1. Transformer son business model avec les outils B Corp™
Comment repenser son modèle d’affaires (à impact) pour aller dans la bonne direction ?
C’était le thème du workshop organisé par B Lab France et Utopies pour faire découvrir les IBM (Impact Business Models), un puissant outil de questionnement pour (re)penser son modèle d’affaires que l’on soit une start-up ou une entreprise établie.
Notre fondatrice, Sophie Conchon, y intervenait au côté d’Isabelle Mashola, co-fondatrice de Isahit, la 1ère plateforme éthique d’externalisation de tâches digitales dont nous avons accompagné l’équipe dans son chemin vers la certification en 2021.
Sophie a pu partager des exemples de transformation d’entreprises que nous avons accompagnées comme Morning. Elle est également revenue sur notre propre chemin d’entreprise en cours de certification et comment l’IBM “Design to Give” a guidé et structuré notre réflexion sur le pro bono chez Wiser Impact pour en faire un levier d’impact complémentaire de nos accompagnements.
Outre les nombreuses entreprises B Corp™ représentées parmi les 1000 solutions du salon, les équipes de l’ONG B Lab Europe et France étaient présentes en nombre. L’occasion de revenir sur l’évolution majeure du standard B Corp™ qui basculera à partir de 2024 d’une logique de seuil de performance globale à franchir (les fameux 80 points au B Impact Assessment) à une série d’exigences minimales pour se certifier (cet article vous en dit plus sur les 10 exigences actuellement en discussion dans la communauté).
2. Les punchlines et l’énergie communicative de Sandrine Dixson Declève du Club de Rome
L’action de cette femme, leader d’opinion sur le changement climatique, est de créer des ponts entre les entreprises et les décideurs politiques. Sandrine Dixson Declève est la première femme présidente du Club de Rome, le think tank devenu célèbre en 1972 en publiant le rapport Meadows “The Limits of Growth” sur l’avenir du modèle de croissance économique. 50 ans plus tard, peu de gouvernements sont vraiment disposés à interroger cette course à la croissance à tout prix et nous sommes dans la situation prédite par le rapport Meadows.
Une petite lueur d’espoir tout de même, est la tenue pour la première fois du Beyond Growth Summit au Parlement Européen le 15 mai dernier. Sandrine Dixson Declève nous a partagé avec enthousiasme la conclusion de ce sommet : “nous avons toutes les clés pour créer une société vertueuse !”
Consciente que la seule bonne volonté de construire une meilleure société ne suffit pas et qu’il faut se battre contre de puissants intérêts privés, elle invite l’auditoire à demander des comptes à nos gouvernements, à soutenir un activisme pragmatique et à voter aux prochaines élections européennes (le 9 juin 2024 ).
On retient aussi sa conclusion longuement applaudie : “There are 3 P we need to exit Power, Profit and Patriarchy, and 3 P we need to shift to People, Planet, Prosperity ”.
3. La mère de la Dougnhut Economy sur scène
“We need to change NOW”. C’est avec ces mots que Kate Raworth – économiste et auteure du livre “La théorie du donut” – a commencé son intervention en rappelant les 6 limites planétaires sur 9 déjà franchies qui menacent sérieusement l’équilibre de l’humanité.
Et cette menace grandissante, c’est l’activité humaine et plus spécifiquement notre système productiviste capitaliste qui l’alimente. Pour Kate Raworth, l’économie actuelle et les décisions politiques n’y changeront rien si on ne réinvente pas totalement l’entreprise. Pour changer le futur, elle propose de changer totalement les caractéristiques des business models dominants : régénérer, plutôt que détruire ; distribuer, plutôt que diviser.
Pour opérer cette transformation, elle propose 5 principes avec lesquels “scanner” les entreprises que l’on connaît en prenant une posture de détective :
- “Purpose” : est-ce que l’entreprise est dirigée par le profit ou par sa raison d’être ?
- “Networks” : l’entreprise repose-t-elle sur des “relations extractives” (lobbying régressif, évasion fiscale, marchandisation de sa chaîne de valeur) ou construit-elle des partenariats collaboratifs avec son écosystème ?
- “Governance” : la gouvernance est-elle uniquement au service du système financier ou de la raison d’être de l’entreprise ?
- “Ownership”: dépend-elle d’un actionnariat “extractif” (venture capital, private equity, stock market) ou d’un “generative ownership” (propriété régénérative) comme Patagonia cité en exemple ?
- “Finance” : son but est-il d’extraire un retour sur investissement financier toujours plus grand (ce que le marché considère comme “fair”) ou d’être au service de la vie et de la raison d’être de l’entreprise ?
Elle conclut en nous invitant à redesigner des entreprises compatibles avec le futur dont nous avons besoin en nous libérant de certains principes de design hérité du siècle passé qui nous conduisent droit dans le mur.
4. Ralentir ou périr ? La nécessaire réinvention de notre modèle de développement
Également invité au sommet Beyond Growth, Timothée Parrique affirme que la décroissance est le stade transitoire nécessaire pour arriver dans un monde post croissance, celui de l’économie du bien-être et non de la croissance du PIB.
À Change Now, l’économiste a débuté son intervention par 5 mots : “We must urgently dismantled capitalism”.
Pourquoi ? Car ce système économique ne mesure que l’agitation économique au détriment du bien-être, de la réduction des inégalités et du respect des limites planétaires. Le problème de notre modèle fondé sur la croissance est que plus celle-ci augmente, plus les pressions sur les écosystèmes augmentent. Et ne lui parlez pas de “croissance verte” ou “d’innovations vertes” qui ne sont qu’un vernis vert sur un système économique destructeur.
Pendant son intervention, l’auteur du livre “Ralentir ou Périr”, dessine les contours d’une économie post-croissance où une période de décroissance démocratiquement organisée est nécessaire pour choisir quelles productions et consommations sont à réduire. Nos économies mondialisées seront plus petites, mais pour lui “a smaller economy can be sweater economy”, car le PIB n’a finalement aucun lien avec le bien-être des individus.
Faire émerger une société différente, compatible avec les limites planétaires et désirable pour tous, c’est l’objectif de la Fresque des Nouveaux Récits.
Si vous souhaitez découvrir cette expérience de 3h30, inscrivez-vous à cet atelier collaboratif et ludique animé par Marie.
Dans un premier temps, vous découvrirez l’influence des récits sur notre cerveau et nos comportements. Ensuite, vous construisez un récit permettant de faire advenir un futur désirable.
5. Une entreprise familiale qui préserve des savoir-faire en France
Loin des discours sur les grandes scènes filmées dont vous pouvez retrouver tous les enregistrements ici, nous avons aussi cherché les témoignages de ceux qui mènent le changement dans leur filière grâce à leur modèle d’entreprise. Revenons ici sur l’intervention hors caméra d’un duo passionné, un père et sa fille tous deux acteurs de la préservation de la filière textile en France : Pierre Schmitt et Agathe Schmitt.
Ils se battent depuis longtemps pour la relocalisation de la filière textile en France. En 2010, Pierre Schmitt reprend l’entreprise Velcorex, la dernière entreprise de velours en France encore en activité et la plus grande en Europe. On lui a souvent dit qu’il était fou de reprendre cette usine, mais pour lui la plus grande des folies aurait été de laisser partir à l’étranger un patrimoine industriel vieux de deux siècles.
Après avoir préservé le savoir-faire sur le velours, Velcorex relance en 2020 la première filature de lin en France, garantissant ainsi un approvisionnement 100% français, de la semence au produit fini.
On a apprécié la perspective historique apportée par Pierre Schmitt sur l’évolution des matières utilisées au cours du XXème siècle : “tout le monde s’est concentré sur le coton, moins cher, et le lin a été totalement délaissé. Le lin c’est une fibre qui ne pollue pas, qui a besoin de beaucoup moins d’eau. En France, on produit les ¾ du lin mondial, malheureusement, tout part en Chine à hauteur de 80% et le reste dans les pays de l’Est.” Pour lui c’était un non-sens, un gâchis total.
Ce défi de réhabiliter le métier de tissage de lin et de développer une vraie filière écologique du lin, a été rendu possible grâce à 1 000 investisseurs citoyens qui ont soutenu le projet sur LITA.co.
Ce témoignage était un bel exemple d’un entrepreneur engagé avec l’ambition de faire de Velcorex une entreprise régénérative en préservant des savoir-faire, en ayant un fort impact local, en assurant une traçabilité des produits et en misant sur la proximité.